Shawn Cenyd Llewellyn

Il est des moments où on a besoin de faire un point sur le passé, des moments où on se demande parfois si on a fait les bons choix tout au long de notre vie et si on continuera ainsi. Du haut de mes vingt-trois ans, je ne pouvais pas prétendre avoir vécu beaucoup de choses et pourtant, j’éprouvais le besoin de faire ce point.

Installé sur le lit de ma chambre dans la demeure familiale, je regardais l’album photo devant moi. Toute ma vie était figée sur quelques bouts de feuilles animées par la magie. Pourquoi avais-je autant envie de regarder ses photos ? Peut-être pour retrouver l’innocence de mon enfance, celle où je n'étais encore qu'un jeune garçon timide et avide de connaissance, celle où notre famille était encore unie par la parole et non par le silence comme elle l’est actuellement.

L’ouvrant à la première page, mon regard se posa sur une photo de mon père et moi. Ce dernier avait posé une main sur mon épaule et arborait un grand sourire, tandis que moi, je tenais serré dans mes bras un livre de magie. Je venais tout juste d'utiliser mes pouvoirs pour la première fois, en faisant venir à moi un livre hors de ma portée. Du haut de mes six ans, je savais déjà lire depuis presque un an et j'adorais dévorer les livres de la bibliothèque familiale.

Tournant la page, je souris en voyant deux bouilles enfantines rire aux éclats. J’ai sept ans de plus que Sacha. C’est beaucoup mais ça ne nous a jamais dérangés pour nous amuser ensemble. Sacha était une petite fille très vive et toujours souriante contrairement à moi qui était toujours sérieux et plongé dans mes bouquins. On dit que les contraire s'attirent, c'est très certainement ça qui a fait que nous soyons si proche malgré notre différence d'âge.

Page suivante ... Sacha avait quatre ans et les yeux pleins de larmes en me disant au revoir sur le quai de la gare. Je partais rejoindre Poudlard pour améliorer mes capacités magiques et devenir un grand sorcier comme mon père. C'était ce que je pensais à ce moment là mais ce n'est plus le cas. Actuellement, je suis sûr qu'en duel, je le battrais haut la main ...

La cérémonie de la répartition ... Un moment que tous les premières années attendaient avec impatience. Savoir quelle maison on allait rejoindre était important pour le moral, et souvent très important pour les familles. Mes parents étaient plutôt cool de ce côté-ci. Tant que je travaillais c'était le plus important et de toute façon, ils se doutaient un peu de la maison qui allait m'accueillir.

Quand mon nom fut appelé, je m’avançai bien droit vers le tabouret et m'installa dessus. La directrice adjointe me posa le choixpeau sur la tête, qui me recouvrit même les yeux, me plongeant dans le noir. C'était pour le moins bizarre et ça aurait du me faire peur mais j'étais confiant et sûr de moi.

- Oh tiens le jeune Llewellyn ! Hum ... difficile à placer ... Tu aurais une envie particulière ?
- Je me fiche bien de ces histoires de maison je suis là pour moi et pas pour les autres !
- Ah ! Un esprit indépendant ! Déjà tu n'a pas ta place chez les poufsouffle c'est certain ! Après ... Gryffondor te conviendrait vu ton courage et ta façon de répondre ...
- ...
- Tu ne dis rien ? Voyons ... Serpentard te permettrait de faire de grandes choses mais tu es aussi avide de connaissance et Serdaigle serait un bon choix.
- Les deux m'iraient très bien ! Faites votre choix qu'on puisse passer à autre chose !
- Pressé d'aller étudier ? ok ok ... ce sera SERDAIGLE !

Le jour se fit alors que l'on me retira le choixpeau. Rejoignant la table qui m'applaudissait déjà, je réfléchissais aux dires du bout de tissus. Il n'avait pas tord, mon père avait été chez les serpents et il était plutôt bien placé au ministère, ayant obtenu la place la plus proche du sommet en devenant le conseiller personnel du ministre.

Sortant de mes pensées, je tournai de nouveau la page pour tomber sur une nouvelle photo de mon père et moi. C'était un moment important à la vue de nos tenues. Je venais de recevoir mes ASPIC avec des optimal dans presque toutes les matières, j'arborais l'insigne de préfet en chef, quand à mon père à côté, il se pavanait dans sa nouvelle tenue en adéquation avec son nouveau rang de ministre de la magie. Mon père était fier de moi et de mes résultats et n'hésitait pas à le chanter sur tous les toits. Moi aussi j'étais content, parce que j'étais promis à un bel avenir. Ce que je ne savais pas c'était que ça allait changer moins d'une année plus tard ...

C'était en avril 1991, je m'en souviens très bien. Ma journée de formation au département des mystères venait de se terminer et je devais rejoindre mon père dans son bureau. A cette heure en principe, il n'avait jamais personne et j'avais pris l'habitude d'entrer sans frapper, sachant pertinemment qu'il ne me dirait rien. Sauf que ce jour-là, le professeur Dumbledore était avec lui ... Ils étaient tellement pris dans leur conversation qu'ils ne se rendirent pas compte de suite de ma présence. C'était plutôt surprenant venant du directeur de Poudlard, lui si méfiant et si attentif habituellement, voilà qu'il avait continué à parler sans se soucier de ma présence. Quand il eut terminé, il se retourna et plongea son regard dans le mien, me faisant limite frissonner.

M'asseyant sur le siège que m'indiquait mon père, je fus bientôt mis dans la confidence vu qu'il s'était avéré que je venais d'entendre une prophétie que la professeur de divination de Poudlard avait dévoilée lors d'une simple discussion avec le directeur. Etant un futur langue de plomb, je savais très bien que tout ça devait rester secret et que rien ne devrait filtrer de ce bureau. Mon père tout comme Dumbledore voulaient me faire confiance, mais avaient-ils raison ? Dans un sens oui, mais jamais personne n'aurait pensé à ce que j'allais faire par la suite ...

Bien que je ne veuille le montrer, toute cette histoire me faisait beaucoup réfléchir. Mon boulot en tant que langue de plomb me permettait d'avoir accès à des connaissances que je n'aurais pas eu en temps normal et bientôt je me plongeai dans l'étude de la magie noire, la magie ancienne et la magie runique. Tout ça était fort intéressant et me permettait d'améliorer sans cesses mes capacités magiques. Mais à trop se plonger dans un tel sujet, on en vient à oublier les autres ...

Vivre au domaine familial est parfois un bien si on aime les repas en famille mais aussi parfois un mal quand on cherche la solitude pour étudier et qu'une personne vient troubler cette solitude ...

Cenyd ?

Sursautant légèrement, je lâchai le lien mental qui m'unissait à la souris, cassant ainsi la réussite de mon sortilège. Poussant un soupir, je me redressai et lançai un regard à ma mère. Cette dernière était la seule à m'appeler par mon second prénom, un prénom Gallois qu'elle avait elle-même choisi.

Qu'y a t-il mère ?
Je suis passée ici hier et ... j'ai vu quelques unes de tes lectures ... Je n'aime pas trop ça. Tu te lance dans des arts trop sombres et très peu adaptés à un jeune homme de ta condition.
Mais mère, que sais-tu vraiment de ma condition ? Je suis majeur et en droit de faire mes propres expériences.
Je refuse que tu étudie ça, tu va me faire le plaisir d'arrêter immédiatement.

La jeune femme s'avança pour prendre le livre qui était posé devant moi et le jeta au loin. Ne faisant ni une, ni deux, je me levai d'un bond et pointai ma baguette sur elle. Elle haussa un sourcil tandis qu'un sourire sadique apparaissait au coin de mes lèvres.

Aurais-tu envie d'avoir un aperçu de mes nouvelles connaissances ?
Cenyd, tu n'oserais pas lever ta baguette sur ta mère quand même !
Je vais me gêner ! Doloris !

Ma mère s'écroula au sol en hurlant de douleur. N'importe quel fils bienveillant aurait arrêté de suite en voyant une telle souffrance mais pas moi. C'était tellement plaisant d'entendre hurler ainsi que je continuai encore quelques instants avant de rompre le lien et de m'accroupir à côté d'elle.

Tu vois mère, il est loin le petit garçon qui avait peur de faire mal à une mouche.
Cenyd ... mais que deviens-tu ...
Un mage noir mère ! Et je vais être le plus fort, celui dont la prophétie parle et bientôt tout le monde aura peur de moi !
Mon petit garçon ... Je ne peux pas te laisser faire ça ...
Et tu crois peut-être que tu es capable de faire quelque chose ? Laisse-moi rire !

Me relevant, je m’éloignai de la femme en lui tournant le dos. Ramassant le livre qu'elle avait jeté quelques minutes plus tôt, je retournai le poser avant de me retourner pour faire face à ma mère qui s'était relevée et pointait sa propre baguette sur moi. La regardant fixement, j'attendis qu'elle jette un sort plus que ridicule que j'écartai d'un simple geste avant de lancer.

Mère tu es ridicule !
Ton père ... je vais le lui dire et il t'arrêtera !
Encore faut-il que tu sorte de cette pièce vivante mère ...

Une lueur de peur passa dans le regard de la femme alors qu'elle tournait la tête vers la porte non loin. Bondissant plus qu'elle ne courut, elle arriva rapidement devant cette dernière mais ne put l'ouvrir, un sort frappant le mur juste à côté d'elle.

Mère ... Mère ... Je vous aime beaucoup mais je n'ai pas le choix ...
Cenyd ... S'il te plaît ... pense à ton père, à ta soeur !
Oh mais je pense à eux en faisant ça. Je leur rend service.
Tu ne peux pas faire ça ...
Bien sûr que si, regarde, Avada Kedavra !

Un éclair vert jaillit de ma baguette et fonça vers la poitrine de la femme qui s'écroula au sol. Faisant tourner ma baguette entre mes doigts, je poussai un long soupir avant d'appeler Dwight, l'elfe de maison qui était à mon propre service. Lui désignant la femme d'un signe de tête, je lui demandai de faire paraitre sa mort comme étant naturelle. L'elfe hocha la tête et transplana avec le corps, me laissant me replonger dans mes bouquins.

La mort de ma mère ne fut pas forcément bien prise par le reste de la famille. Je cachai mon air satisfait en m'isolant, expliquant que je préférais être seul pour faire mon deuil. Sacha de son côté était complètement effondrée et j'avais eu du mal à la consoler. Seul le temps pourrait l'aider à s'y faire mais du haut de ses treize ans, notre mère était quelqu'un d'important pour l'adolescente.

Moi j'avais vingt ans ... vingt ans et des connaissances qui dépassaient de beaucoup celles des autres langues de plombs travaillant depuis de nombreuses années au ministère. J'étais devenu fort et puissant mais seul je ne valais rien, seul j'étais incapable d'avancer dans mon projet. Il allait falloir que je sorte, que je me fonde dans la masse et que je trouve des disciples, des jeunes dignes de recevoir mon enseignement, dignes de rejoindre mes idéaux.

C'est lors de l'une de ses nombreuses sorties que je rencontrai Bryanna. Jeune fille de sang-pure du même âge que moi, elle avait fait ses études chez les serpentard. J'aurais du la remarquer vue sa beauté et son caractère mais à l'époque j'avais trop le nez plongé dans les bouquins pour voir et surtout profiter de ce que la vue pouvait offrir. Il ne me fallut pas longtemps pour cerner la demoiselle mais aussi pour décider de la faire mienne. Une demande en mariage en bonne et du forme à son père et bientôt elle devint ma fiancée. Mais je ne m’arrêtai pas là …

Sans lui dévoiler tous ce que j'avais prévus, je lui demandai de se lier à moi d'une façon que j'avais créé moi-même. Le serment inviolable. Un sortilège me permettant d’être certains que les quelques secrets que je partagerais avec elle ne tomberait pas dans l’oreille de n’importe qui. Si elle se permettait d’en parler, elle mourrait sur le champ.

Voilà maintenant deux ans que nous sommes en couple. Vivant dans une petite maison à Pré-au-Lard, elle continue son travail à Sainte-Mangouste alors que moi je suis devenu officiellement un langue de plomb. Nos temps libre, on les passe à parfaire nos connaissances magiques, voir même à faire quelques virés en ville pour tuer quelques moldus. Anna n’est pas aussi douée que moi, loin de là mais elle est entièrement dévouée à ma cause et fait tout pour me plaire. C’est agréable mais encore une fois, je sais qu’à deux nous n’irons pas loin, il faut que je recrute encore et encore, que je monte un groupe plus important et surtout que je prouve ma valeur aux yeux de tous …