Alix Isabella Selwyn

"Mlle Selwyn, bonjour. Je vous en prie, entrez, c'est chez vous après tout..."

Habillé de ma robe de sorcière, coiffée d'un chignon fait sur le vif, je refermais la porte du petit salon derrière moi. Le journaliste avait prévu sa visite depuis une semaine mais ça n'avait aucune importance ici. La preuve, cela faisait près d'une heure et demi qu'il attendait que je vienne le rejoindre. Car, bien sûr, ma mère m'avait retenu, prétextant des affaires importantes. Mais, en fait, rien de nouveau. Juste des histoires de famille, des histoires d'importance de sang et de son rôle et de la chance que j'avais d'être sa fille. L'homme était finalement venu se manifester et ma mère avait fait mine de l'avoir oublié et lui a assuré que" Bella" viendrait bientôt le rejoindre. En effet, dix minutes plus tard, elle avait enfin bien voulu me laisser partir... Une fois que je le lui ai demandé avec un très joli sourire. Hypocrite.

"Je vois vraiment pas pourquoi vous avez insisté pour me parler. Je sais bien que c'est une mode en ce moment d'interviewé des jeunes, mais, sérieusement, vous aviez que moi à vous mettre sous la dent? Enfin, je m'en plains pas, vous m'avez libéré de ma mère, elle commence à me prendre la tête sérieusement. Bon... maintenant que je suis là... On va prendre son temps, vous êtes d'accord?"

Je lissais ma robe sous mes jambes avant de m'assoir sur le canapé de cuir assez peu confortable qui trônait autour de la petite table richement décoré. Un cadeau de tante Elisabeth. Je détournais les yeux de l'objet pour reporter son attention sur le journaliste. L'homme semblait quelque dérangé dans son attitude professionnel par la familiarité avec laquelle je m'adressais à lui mais je m'en fichais.

"Bien... Allons-y, alors... Vous êtes fille unique, c'est bien ça?
-Oui."

Et je m'arrêtai là. Contrairement aux adultes qui avaient le don de répondre en parlant pendant quinze minutes pour expliquer pourquoi il leur semblait qu'en effet, ils aimaient leur famille. Et bien, moi j'aime bien les réponses courtes. Seulement quand les gens en veulent des longues et détaillés. Appelez ça l'esprit de contradiction si ça vous amuse, mais moi, ça m'éclate. Le pauvre, il a l'air si patient. Désolée, mais moi j'adore. Oui, je suis fille unique. Fallait pas trois heures pour confirmer un truc pareil! Et puis c'est quoi c'te question... C'est pas écrit sur ta fiche peut-être? Tu sais pas lire? Et comme je m'y attendais, quoi qu'il fut possible qu'il se tire après l'attente et mon manque de coopération, il tenta de reprendre :

"Vous le vivez bien?
-Oui."

Non mais sérieusement, gars, tu le fais exprès quoi... Si tu veux une réponse complète, tu évites les questions auxquels tu réponds par oui ou par non. Tu me demandes d'approfondir, tu me demandes pourquoi, comment... Mais là tu t'enfonces gars. Sérieux, des perches pareils, faut pas me les tendre, je peux pas ne pas les prendre...

"Vous pouvez m'en dire plus?"

Et bien voilà! Tu vois quand tu veux! C'est bien, tu veux un su-sucre pour te récompenser? Okay, d'accord, je reste sérieuse.

"Je peux pas dire que ça m'est manqué d'avoir des frères ou des sœurs, j'en ai jamais eu. Ca vous manque à vous les moyens de transports moldus? Bah non, vous les prenez pas."

Oui non mais... C'est pas tout d'être capable de poser des questions pour faire parler les gens mais se serait pas mal que ce soit des questions un tant soit peu intelligente. T'es sûr que t'es journaliste toi? Quoi que je veux bien concevoir que toutes les personne interviewé ne sont pas aussi chiante que moi. Désolée, je dois tenir ça de ma mère. Ah bah c'est pas ma mère pour rien, je pouvais pas ne rien prendre et de ma mère et de mon père. On appelle ça une adoption ou un kidnapping d'enfant dans ce cas-là....

"Mais vous avez été entouré par des cousins et des cousines qui sont de familles nombreuses, n'est-ce pas? Du côté de votre père notamment?
-En même temps, du côté de ma mère, Théo est également fils unique..."

Oups, désolée, celle-là elle est sortit toute seule. Oh ça va, fait pas cette tête, je t'ai pas tué non plus! T'avais pourtant bien démarré. T'avais pas l'air totalement crétin. Mais évidemment, il a fallu que tu sortes ce genre de bêtise à la fin...

"Je suis pas vraiment proche de mes cousins et leur "complicité" n'est pas vraiment enviable. Quoi que... vous croyez qu'avec un plus grand ou un plus petit, ma mère serait un peu moins sur mon dos?"

Et non, je ne m'excuserais pas. Je vais pas m'excuser d'avoir été franche. Est-ce que tu t'excuses de poser des questions bêtes toi?

"Vous n'aimez pas les enfants de votre tante Elisabeth?"

Je hausse les épaules. C'est débile comme question. T'a pas remarqué le ton que j'ai employé? C'est un ton qu'on utilise avec les gens qu'on aime ça?

"Et votre cousin Théo?
-Il est sympa.
-Vous êtes proches?"

De dieu, t'es sourd? Je viens de dire qu'il était sympa! Faut te l'écrire ou te le dire en quel langue pour que tu comprennes? En fait, il est pas spécialement sympa, c'est juste qu'il est pas spécialement con.

"On s'aime bien. Sinon, vous avez d'autres questions?"

Oui non mais je veux bien être sympa et tout et tout et tout, mais là tu pousses le bouchon un peu loin. Alors quoi? Si tu voulais interviewer mes cousins, t'avais qu'à aller les voir! Je te garantis pas que Théo t'aurait beaucoup plus répondu mais Calypso aurait été ravie d'attirer l'attention!

"Et bien... Comment s'est passé votre enfance avec votre famille?
-Très bien, j'imagine. Je me trouve assez chanceuse, presque. Théo n'a plus sa mère, et puis les enfants d'Elisabeth... Bah ce sont les enfants d'Elisabeth quoi, avoir une mère qui se marie 4 fois en 40 ans et des p'tits frères et soeurs à la pelle... Je sais pas, c'est pas vraiment le genre d'ambiance que j'aimerais. Donc, ouais, j'imagine que j'ai de la chance."

Non, mais oui, vous avez parfaitement raison : je mens. Non parce que... Dire que ma mère me tape sur le système, c'est quelque chose mais... Bon, mes parents tiennent pas mal à la vie de famille quoi. Dans le sens où ils trouvent qu'ils font beaucoup pour moi, qu'on est une famille soudée, etc... Alors bien sûr, j'ai le droit de faire à peu près tout ce que je veux. Mais mes parents trouvent que je fais pas beaucoup d'efforts pour mon avenir, alors en ce moment ils sont toujours derrière mon dos. Au départ, je m'en débarrassais en prétendant avoir envie de dormir, avoir faim, avoir besoin d'un truc en rapport avec ce qu'ils disaient... Genre ma mère me dit qu'il serait temps que je vois ce qui peut me plaire... est-ce que j'ai regardé une carrière chez les médicomages? Ou dans la Justice Magique? Tiens maman, en parlant de justice, tu crois que Tidwell va s'en sortir? Dans DailyProphet, ils disent qu'il avait déjà fait du trafic de tapis volants, mais que cette fois, ils avaient assez peu de preuve sur lui. Cela dit, le fait qu'il est agressé le brigadier qui est venu l'arrêter, ça va pas jouer en sa faveur... Et ma mère qui s'enchante : oh ma chérie, tu as vu ça, et ça t'intéresse? Tu feras peut-être une carrière de juriste ma chérie.... Mais oui bien sûr : Je vais y réfléchir maman, je vais y réfléchir. Et ma mère, aux anges, réponds : Réfléchis ma chérie, réfléchis. Je te laisse réfléchir... Attendez! parce que ça... ça, c'était au départ! C'est depuis les vacances avant ma cinquième année qu'on me tanne de cette manière! Et je vous jure qu'un an, c'est long! Alors, d'accord, je suis à Poudlard les trois/quarts du temps, mais vous savez, y a un moyen de communication très pratique, ça s'appelle le hibou. Je reçois une lettre par semaine. Si, si, je vous assure. Et encore, quand j'ai de la chance! Je peux largement passer à 4 lettres par semaines. Autant vous dire que je commence à perdre et de l'imagination pour m'en sortir, et de la patience pour ne pas péter un câble. Mais non, je dois me retenir... Alors oui, j'ai tout ce dont j'ai envie... Mais en ce moment, j'ai aussi beaucoup que je en veux pas! Des fois, j'aimerais juste qu'ils me fichent la paix... Mais bon, la famille, c'est sacré, alors je dois faire bonne figure, je fais des efforts... Mais bon, on me demande de grandir, de me prendre en main, etc... Mais pendant tout ce temps, ma mère me parle et s'occupe toujours de moi comme si j'avais 5 ans! Et oui, clairement, ça m'emm**de! Désolée, c'est... y a pas d'autres mots quoi...

"Vous imaginez que vous avez de la chance?"

Tu étais perroquet dans une vie antérieur, toi?

"Bah oui... Je veux dire, mes parents sont toujours aux petits soins avec moi... Quand je vois mes camarades à Poudlard, je vois clairement que je suis privilégiée...
-A cause de votre sang?"

T'es un crétin toi... Et puis quand tu t'y met, tu fais pas les choses à moitié...

"Non, à cause de mon argent."

Crétin.

"Mais votre famille n'est-elle pas fière de votre sang-pur?"

De dieu, mais tu me gonfles...

"Si, ma famille est fière. Ca doit être normale j'imagine. Mais à Poudlard, j'ai rencontré des élèves, qui sont pour la plupart des mêlés comme vous..."

Sauf qu'ils sont pas tous aussi chiant.

"Et j'ai jamais eu de problème avec eux.
-Vous n'aviez pas de préjugés avant d'aller à Poudlard?
-Si, je crois, mais j'ai appris à changer d'avis à l'école.
-Vous étiez heureuse de partir à Poudlard?"

P'tain, mais t'a vraiment des questions bêtes toi... t'en connais beaucoup des élèves qui y vont à reculons?

"Oui, bien sûr.
-Serpentard est une maison qui vous convient?
-... Bah même si c'était pas le cas, je peux rien y faire. A moins que vous connaissiez un moyen, vous?
-Euh... non. Vos relations avec vos parents ont-elles été différentes en arrivant à Poudlard?"

Euh...

"Je crois... Disons que c'était une autre sorte de relation. Au départ, j'avais jusqu'à une lettre par jour, ma mère était vachement inquiète pour moi..."

Et je vous assure que pour quelqu'un qui faisait ses premiers pas, avoir du courrier tous les jours, ça l'a fous mal face aux autres.

"Ca vous a rapproché d'eux?"

Non mais sérieux... Qu'est-ce que tu veux que je réponde à ça? Je peux pas dire non à une question pareille...

"Bah... c'était un peu étouffant quoi. J'arrivais à Poudlard, comme beaucoup d'autres, j'ai murit, mais j'avais encore ses lettres qui me ramenaient à cet état de petite fille de mes parents. Alors c'était sympa, j'avais des nouvelles avant même d'avoir envie d'en demander..."

Et je vous assure qu'aujourd'hui, j'ai plus du tout envie. Et non, je m'arrête là. La suite ne plairait pas à mes géniteurs.

"Vous vous sentez bien à Poudlard? Vous vous êtes fait des amis, je suppose?
-Vous supposez bien. J'en ai pas énormément, mais ceux avec qui je m'entends réellement bien, je sais que je peux compter sur eux. Et je vois pas qui pourrait se sentir mal à Poudlard...
-Certes. Comment se passent vos études? Vos parents sont fiers de vous?
-Alors, oui, je me débrouille. Comme tous mes camarades, j'ai des matières avec lesquels j'ai quand même plus de feeling que d'autres. J'ai eu un Optimal pour mes BUSE en histoire de la magie et en sortilèges mais pour la plupart des matières, je me balade entre un Acceptable et un Effort Exceptionnel. Après, je me suis planté en Divination, mais c'est pas forcément une matière que je trouve capital. J'ai aussi abandonné l'astronomie malgré mon Acceptable parce que je préfère pas m'encombrer d'une matière qui me sera d'aucune utilité... Mes parents ont été assez satisfait de mes résultats. Mais un peu moins en voyant que j'avais eu 5 retenus pour insolence pendant l'année..."

Et encore, ils ne savent pas que je me balade dans Poudlard pendant la nuit....

"Pour insolence?
-Oui.. Parait que c'est l'âge selon ma tante.
-Votre tante?
-Eowyn Selwyn. Je passe mes vacances de Pâques ou de février avec elle tous les ans.
-Vous vous entendez bien avec elle?"

A ton avis, crétin? Non, je vais chez elle parce que ça me plait absolument pas : je suis maso!

"Oui.
-Et que pense-t-elle de votre parcours scolaire?
-Ça l'amuse plutôt. En même temps, en étant sans enfant, elle peut se permettre."

Oui bah ça va me regarde pas comme ça... Oui, ça m'arrive de sourire, et alors? T'a jamais vu personne sourire ou quoi?

"Je lis que vous faites partis de l'équipe de quidditch... Ça fait longtemps?
-Depuis ma troisième année. Maëlys Tanners avait quitté l'équipe l'an passé et comme Eliud en était le capitaine, je peux pas dire que j'étais nulle au quidditch quoi. Et finalement, j'ai été retenue. Je dirais pas que je suis aussi douée que lui, ce type à le quidditch dans la sang, mais je me débrouille plutôt bien je crois... En même temps, sinon, j'aurais pas été retenue!
-Oui, j'imagine. Vous vous êtes rapproché de vos cousins et cousines à Poudlard?
-Oui pas mal. Surtout Calypso."

Ou plutôt, c'est plus elle qui se rapproche de moi. On serait pas cousines, on pourrait croire qu'elle est folle de moi. Cela dit, j'ai une petite préférence pour les hommes... Non, c'est pas pour autant que j'apprécierais que Roman soit fou de moi! C'est même pas envisageable! Et puis... puisque tu aimes que je te parle, autant en rajouter une couche...

"On s'entend plutôt bien et je crois qu'elle m'adore. Elle m'attends à la fin des cours ou des déjeuners, elle s'assoit près de moi en cours ou dans la salle commune... J'ai l'impression d'être un peu son modèle ou son repère dans la vie."

Elle va être verte en lisant ça dans SorcièreHebdo! Elle va être verte... Ah, je m'aime...

"J'ai crut comprendre que vos parents ont déjà entrepris de vous lier à un de vos cousins. Est-ce Théodore ou Roman?
-C'est to...Kévin.
-Le dernier de la fratrie?
-Non, il est en cinquième année."

Mais il a bien la mentalité d'un première année, no soucis...

"Vous êtes heureuse du choix de vos parents?
-Non mais... c'était de l'humour, je suis pas fiancée. Ma mère essaye de voir avec d'autre familles de sang-pur, mais pour le moment, c'est pas encore conclus."

Cherche pas, je te dirais pas qui ma mère a dans le viseur. Ca m'arrangerait bien de devenir majeur avant qu'elle puisse me caser, comme ça je serais libre... Dans l'hypothèse où la majorité retire l'autorité qu'à un maitre de famille chez nous autres sang-purs...

"Oh... très bien... Vous n'aimeriez pas que votre mère vous lie à l'un de vous cousins?
-Roman serait ravi, je crois. Il adore mes cheveux et je crois qu'il a un petit faible pour moi, il peut pas s'empêcher de venir me voir quand il le peut. Mais non, je serais pas particulièrement ravie. En plus notre grand-mère à Théo et moi s'arrange déjà pour trouver une dulcinée à Théo..."

Mon dieu, dites-moi que c'est bientôt finis... Non, je suis pas croyante, mais des fois, quand on a plus d'autres espoirs, faut toujours tenter, j'ai rien à perdre de lui demander un coup de main si jamais il existe. Si j'ai rien, ce sera pas étonnant, si ça marche, ce serait génial comme coïncidence!

"Vous avez des projets pour l'avenir?"

Non... Au secours... Mais qu'est-ce que vous avez tous avec mon avenir, sérieusement?!

"Non, pas pour le moment, mais j'y réfléchis."

Sourire forcé ponctuant mon affirmation. De dieu, profite-en, et va-t-en sur une note positive!

"Très bien... Et bien je crois que j'ai tout ce dont j'ai besoin. Je vous remercie de votre coopération."

Oh, merci mon dieu... Non, je suis toujours pas croyante. C'est ce qu'on appelle une "façon de parler" ou une "expression". Troisième sourire depuis l'entretien.

"J'en suis heureuse pour vous. Au revoir. Je vous raccompagne pas, vous connaissez la sortie."

Oui, je sais, c'est pas bien, si j'étais bien élevé, je l'accompagnerais, si j'étais une bonne maitresse de maison, je l'accompagnerais et si j'étais la digne fille Selwyn, je l'accompagnerais. Sauf que je suis rien de tout ça et je ne souhaite pas le devenir. Je veux juste être moi et vrai jusqu'au bout. Oh pis, ça va, il va se perdre non plus, y a juste 50 mètres de couloirs et 6 escaliers à traverser pour sortir... Oui, ça m'éclate. Ça va, ma mère a un sixième sens, s'il a pas de bon sens, ma mère saura le retrouver et le ramener à bon port...